Entropie et expansion, les moteurs de l’Univers
On pense souvent que c’est l’énergie qui anime l’Univers. Pourtant c’est autre chose : l’entropie.
On l’a découverte au XIXe siècle en étudiant la machine à vapeur. En fait, une voiture ne consomme pas l’énergie chimique de l’essence : elle ne fait que la transformer en énergie mécanique et en chaleur dans les gaz d’échappement et les frottements. Si la voiture avance, c’est parce que l’énergie de « haute qualité » du pétrole, stockée au Carbonifère, s’est transformée en énergie de « basse qualité », la chaleur. On dit que l’entropie a augmenté. Plus précisément, l’énergie du pétrole élaborée par la vie, est une forme improbable, tandis que la chaleur dégagée est une énergie probable et courante. Ce passage de l’improbable (une forme d’ordre) au probable (désordonné) est ce que l’on appelle un accroissement d’entropie.
Le moteur de l’Univers
Tout ce que nous voyons dans l’Univers, fonctionne grâce à une réserve de faible entropie qui se déverse dans un espace d’entropie élevée. Par exemple, en se formant, l’étoile récupère l’énergie potentielle des particules qui s’agrègent par la gravitation. En son sein, cette énergie faiblement entropique est dégradée d’une part en rayonnant et d’autre part, en élaborant des éléments chimiques. Ainsi, pour fonctionner, l’étoile doit fabriquer de l’entropie.
D’où vient la faible entropie initiale ? Elle provient du Big Bang. Pour des raisons encore controversées, l’Univers est né ordonné, c’est-à-dire doté d’une faible entropie prête à se dissiper en énergie libre.
Où se dissipe l’entropie ? Si l’Univers était statique, cette chaleur se serait accumulée et il serait devenu un brasier. Il n’en est rien pour une simple raison : il est en expansion et se refroidit sans cesse. On peut donc dire que l’entropie dégagée par tous les phénomènes, se dissipe dans l’espace nouveau créé à tout instant par l’expansion.
En conclusion, l’Univers est mu par la faible entropie initiale d’un côté (la source chaude de Carnot) et par l’expansion de l’autre (la source froide).
Le rôle de l’entropie
L’entropie est tellement fondamentale que beaucoup y voient la cause du temps. Comme le pointe Carlo Rovelli, on ne voit pas apparaître de flèche du temps au niveau microscopique : les équations de la mécanique quantique fonctionnent tout à fait symétriquement en avançant dans le temps ou en reculant. En revanche, à notre échelle, nous voyons une flèche du temps, du fait que les phénomènes vont toujours de l’entropie faible vers l’entropie maximum, comme l’eau descend toujours les pentes. Ainsi apparaît l’irréversibilité du temps qui nous est familière.
C’est aussi l’entropie qui anime les structures complexes : une étoile, un être vivant, un écosystème, un cerveau… Toutes ces structures parviennent à piéger temporairement des états faiblement entropiques de façon à canaliser le ruissellement et à obtenir un travail en échange de la dissipation d’entropie. Cela rappelle le moulin hydraulique vers lequel on dévie une partie d’un cours d’eau, de façon à profiter ensuite d’une chute de niveau pour faire tourner sa roue à aubes.